Qualité de l’air extérieur
La connaissance des effets sanitaires et environnementaux de la pollution de l’air ambiant par un grand nombre de polluants chimiques est bien connue depuis de nombreuses années. Il est clairement établi aujourd’hui, notamment sur la base de plusieurs études épidémiologiques, que les niveaux de pollution actuels de l’air ambiant ont un impact sur la santé, et plus particulièrement au niveau respiratoire et au niveau cardiovasculaire. L’Agence est mobilisée depuis de nombreuses années sur la problématique de la pollution de l’air extérieur et des impacts sur la santé humaine et mène divers travaux d’évaluation scientifique.
Qualité de l’air extérieur : compléter la surveillance réglementaire actuelle
En Europe, la stratégie de surveillance de la qualité de l’air se base sur les directives européennes 2008/50/CE du 21 mai 2008 et 2004/107/CE du 15 décembre 2004. A la demande des ministères en charge de l’écologie et de la santé, l’Anses a proposé dans un avis de juillet 2017 une liste de polluants pour lesquels différentes actions sont recommandées. .
Ce travail d’expertise a permis de pointer une liste de 13 polluants prioritaires :
- l’Anses souligne l’intérêt d’une surveillance nationale du 1,3-butadiène, un polluant émis notamment par des activités industrielles traitant du plastique et du caoutchouc mais aussi par l’échappement des moteurs automobiles et la fumée de cigarette. Le 1,3-butadiène, classé cancérogène de catégorie 1 par le CIRC, fait l’objet de différentes campagnes de mesures ponctuelles en France, conduisant fréquemment à des dépassements de la valeur toxicologique de référence (VTR) retenue, quelle que soit la typologie des sites de mesures ;
- par ailleurs, l’Agence insiste sur la nécessité de compléter et de pérenniser l’acquisition de données dans l’air ambiant pour les particules ultrafines (PUF) et le carbone suie et d’assurer un suivi particulier sur le long terme sur ces deux substances, compte tenu de leurs enjeux potentiels en termes d’impact sanitaire ;
- concernant les 10 autres polluants (le manganèse, le sulfure d’hydrogène, l’acrylonitrile, le 1,1-2-trichloréoéthane, le cuivre, le trichloréthylène, le vanadium, le cobalt, l’antimoine, le naphtalène), l’Agence souligne que des dépassements de VTR peuvent être observés dans des contextes particuliers (industriels notamment), et recommande de s’assurer notamment de l’adéquation de la surveillance réglementaire de telles installations concernant l’émission de ces polluants.
L’Agence soutient également la nécessité de développer à l’échelle nationale une banque de données de mesures existantes des polluants dans l’air ambiant actuellement non réglementés, à l’instar de ce qui existe pour les polluants réglementés, pour faciliter l’accès à ces données pour des travaux de recherche ou d’expertise.
Pollens et allergies
Depuis plusieurs décennies, la prévalence des allergies augmente dans la population et ce dans un grand nombre de pays, et particulièrement en France. Le nombre de personnes souffrant d’allergies a ainsi plus que doublé au cours des vingt dernières années. L’allergie aux pollens (pollinose) touche actuellement 15 à 20 % de la population française.
En raison de l’augmentation de la quantité de dioxyde de carbone dans l’atmosphère et du réchauffement climatique, les quantités de pollens émis devraient augmenter au cours des prochaines décennies et de nouvelles variétés de pollens pourraient atteindre des régions où elles ne sont pas encore observées. Par ailleurs, les polluants atmosphériques issus des activités humaines peuvent agir sur les pollens : en détériorant leur paroi, ils facilitent la libération d’allergènes par les grains. Les pollens ainsi modifiés ont un potentiel allergisant beaucoup plus élevé. Parallèlement, certains polluants chimiques de l’air peuvent accroitre la sensibilité des personnes et les rendre ainsi plus sensibles aux pollens.
En 2013, l’Anses a produit un état des connaissances complet sur les pollens dans l’air ambiant. Il ressort notamment de ces travaux d’expertise que :
- les pollens particulièrement problématiques en France sont les pollens de graminées, de bouleau, d’ambroisie et de cupressacées (comme le cyprès, le thuya, le genévrier par exemple) ;
- il ne semble pas possible à l’heure actuelle de déterminer un seuil d’apparition d’effet pour les différents pollens, notamment parce qu’il existe de nombreux facteurs qui interviennent sur la relation dose-réponse comme par exemple le pouvoir allergisant du pollen, la sensibilité individuelle, etc. ;
- le changement climatique influencerait la date de début de pollinisation de nombreuses espèces végétales. Celle-ci deviendrait plus précoce ayant pour conséquence un allongement de la durée de pollinisation.
Les concentrations de pollens dans l’air ambiant en France sont actuellement surveillées par le Réseau National de Surveillance Aérobiologique (RNSA). Dans ses recommandations, l’Anses indique en particulier la nécessité de pérenniser la surveillance des pollens dans l’air.
En complément, l’Anses, à la demande des ministères chargés de la Santé et de l’Environnement et dans le cadre des actions relatives à la prévention des pollinoses du 3ème Plan national santé-environnement (2015-2019), dresse actuellement un état des connaissances relatif aux pollens et moisissures de l’air ambiant des départements et régions d’outre-mer les plus préoccupantes en termes sanitaires. L’objectif est également de fournir des recommandations scientifiques et techniques en termes de surveillance métrologique, de détection et d’accompagnement des personnes allergiques, d’information du public et des acteurs concernés (professionnels de santé…) et d’actions de prévention à mette en œuvre pour réduire les expositions et les impacts sanitaires associés.
Pesticides dans l’air ambiant
L’utilisation de pesticides peut être à l'origine d'expositions multiples. Si les expositions alimentaires sont aujourd'hui de mieux en mieux documentées, la connaissance de l’exposition de la population générale aux pesticides par la voie aérienne demeure parcellaire, en l’absence notamment de réglementation spécifique sur la surveillance des pesticides dans l’air ambiant.
Dans ce contexte, et dans le cadre du nouveau plan national santé environnement 2015-2019, sur saisine des ministères en charge de l'agriculture, de l'écologie, de la santé et du travail, l’Anses a mené des travaux d'expertise collective visant à proposer les modalités de mise en œuvre d’une surveillance nationale des pesticides dans l'air ambiant en France métropolitaine et dans les départements et régions d'outre-mer (DROM). Fondée sur une liste de 90 substances prioritaires, cette surveillance nationale doit permettre d'évaluer l'exposition chronique de la population générale et les risques sanitaires associés. Les résultats de cette expertise seront utilisés par le Laboratoire Central de Surveillance de la Qualité de l'Air (LCSQA), en lien avec plusieurs Associations agréées de surveillance de la qualité de l’air (AASQA), afin de définir le protocole d’une campagne exploratoire qui démarrera en 2018, pour une durée d’un an.
L’Agence recommande, en complément de cette surveillance nationale, de mettre en place des campagnes de mesures particulières visant à évaluer l'exposition de populations vivant à proximité des sources d'émissions de pesticides, notamment les riverains de zones agricoles.
Les données obtenues lors de ces campagnes seront également utilisées dans le cadre du dispositif de phytopharmacovigilance de l'Anses, qui a pour objectif de surveiller les effets indésirables des produits phytopharmaceutiques disponibles sur le marché.
Ces travaux font suite à l’état des lieux des connaissances quant à la présence de résidus de pesticides dans le compartiment aérien et les environnements intérieurs que l’Agence avait lancé en 2008 dans le cadre de l’Observatoire des Résidus de Pesticides (ORP). Ces travaux avaient abouti, en octobre 2010, à la publication d’un rapport de « Recommandations et perspectives pour une surveillance nationale de la contamination de l’air par les pesticides ».
Pollution atmosphérique urbaine : particules de l’air ambiant et composition chimique
De nombreuses études attestent des effets de la pollution atmosphérique urbaine sur la santé de la population. D’après des données récentes françaises, issues du projet Aphekom portant sur neuf villes, l’espérance de vie à 30 ans pourrait augmenter de 3,6 à 7,5 mois selon la ville, ce qui équivaut à différer près de 3 000 décès par an, si les concentrations moyennes annuelles de particules de type PM2,5 respectaient la valeur guide de l'OMS (10 µg/m3).
En 2012, le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC) a classé les gaz d'échappement des moteurs diesel comme cancérogènes pour l’Homme (groupe 1) et en 2013, il a classé la pollution atmosphérique et les particules de l’air ambiant également cancérogènes pour l’Homme (groupe 1).
Des interrogations subsistent quant aux effets sanitaires potentiellement associés à la composition de l’aérosol particulaire dont l’évolution au cours des dernières années est vraisemblable.
Dans ce contexte et en appui aux gestionnaires, l’Anses mène des travaux scientifiques visant à expertiser les données toxicologiques et épidémiologiques en lien avec la composition chimique et la granulométrie des particules.
Concernant plus spécifiquement la source « trafic routier », l’Anses travaillera à définir l’évolution rétrospective et prospective des émissions de particules selon le parc roulant français et des cycles se rapprochant d’usage réel en considérant différents scénarios, et à identifier les impacts différenciés des technologies de dépollution sur les émissions de particules par la source « trafic ». Ces éléments pourront être mis en regard avec les données d’émission disponibles concernant les autres sources de particules.