Moustiquaires et tissus imprégnés de produits insecticides
Évaluation des risques liés à l’utilisation de produits biocides insecticides pour l’imprégnation des moustiquaires et des vêtements
En l’absence de vaccin et de traitement du chikungunya, la principale voie de contrôle de l’épidémie, qui a eu lieu en 2005-2006 à La Réunion a été la lutte contre les moustiques responsables de la transmission de cette maladie. Aux côtés de ces opérations de démoustication des recommandations encourageant l’utilisation de moustiquaires ou de vêtements imprégnés ont été émises par plusieurs organismes. Dans ce contexte, l’Agence a été saisie afin de préciser les conditions d’utilisation de ces moyens de protection et d’évaluer la toxicité à court, moyen et long termes de leur usage répété.
Le chikungunya est une maladie virale transmise d’homme à homme par la piqure d’un moustique de l’espèce Aedes albopictus. En 2005/2006, une épidémie de chikungunya a eu lieu à La Réunion. Après un premier épisode entre mars et juin 2005, l’épidémie de chikungunya a repris à La Réunion en octobre 2005 atteignant un pic en février 2006. L’Institut de veille sanitaire (InVS) a estimé qu’environ 266 000 personnes ont présenté une forme clinique de la maladie et des formes sévères de cette maladie ont pour la première fois été décrites. Pendant la période janvier-décembre 2006, 246 personnes ont été hospitalisées dans un service de réanimation à La Réunion.
En l’absence de vaccin et de traitement de cette maladie, la principale voie de contrôle de l’épidémie de chikungunya, a été la lutte contre les moustiques responsables de la transmission de cette maladie (vecteurs) et de leurs larves dans l’optique de réduire leurs densités. Pour être efficaces, ces opérations de démoustication devaient également être accompagnées de mesures de protection individuelle visant à prévenir la population générale des piqûres de moustiques. Des recommandations encourageant l’utilisation de moustiquaires ou de vêtements imprégnés ont ainsi été émises par plusieurs organismes (Afssaps (aujourd'hui ANSM), InVS…), notamment pour la protection des enfants de moins de 30 mois et des femmes enceintes.
Dans le cadre de la gestion de la crise due à l'épidémie de chikungunya à La Réunion, le Directeur général de la Santé (Ministère chargé de la Santé) et le Directeur de la prévention des pollutions et des risques (Ministère chargé de l’Ecologie) ont saisie l’Agence en août 2006 afin d’évaluer les risques liés à l’utilisation répétée des produits insecticides d’imprégnation des moustiquaires et des vêtements à court, moyen et long termes.
Au regard des compétences spécifiques nécessaires pour mener à bien ce travail, un groupe d’expert dédié a été constitué afin de rassembler les compétences des toxicologues du CES Biocides de l’Agence, mais aussi les entomologistes de l’Institut de recherche pour le développement (IRD), de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et des services de santé des armées.
Le travail de l’Agence et recommandations
Sur la base de la littérature et des recommandations internationales disponibles (notamment celles de l’OMS), l’Agence a identifié les produits disponibles sur le marché et les dangers associés. Des scénarios d’utilisation ont ensuite été proposés et les expositions correspondantes évaluées.
La perméthrine et la deltaméthrine sont les deux substances actives couramment utilisées en imprégnation des tissus.
Si, dans un premier temps, l’efficacité d’une moustiquaire pour se prémunir des attaques d’un moustique actif en journée, tel que le moustique responsable de la transmission du chikungunya, peut surprendre, le travail de l’Agence a montré que cette utilisation en termes de frein à la transmission de la maladie était important.
L’isolement des malades, suspectés d’être infectés par le virus du chikungunya, sous moustiquaire permet en effet d’éviter que les moustiques venant se nourrir de leur sang ne se contaminent et infectent d’autres personnes. Les moustiquaires permettent par ailleurs de protéger les populations vulnérables comme les jeunes enfants qui ne marchent pas encore, les personnes alitées ou bien encore les femmes enceintes.
L’Agence a ainsi recommandé d’utiliser préférentiellement les moustiquaires pré-imprégnées industriellement à longue durée d’action dont l’évaluation n’a pas mis en évidence de risque particulier.
Enfin, le travail de l’Agence a montré que l’utilisation de vêtements imprégnés pouvait également apporter une protection supplémentaire notamment pour les populations dont l’activité ne leur permettait pas de séjourner sous une moustiquaire. Cette expertise scientifique a été accompagnée de recommandations d’usage afin de garantir la sécurité des utilisateurs.
Ces recommandations peuvent s’appliquer à d’autres contextes épidémiques que celui de La Réunion, lorsque le comportement du moustique vecteur est comparable à celui du moustique responsable de la transmission du chikungunya.