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La grippe du porc, une problématique pour les élevages et la santé humaine

Les actions de l’Anses sur les virus influenza porcins

La grippe du porc est une maladie respiratoire virale fréquente dans les élevages de porcs français. Elle est généralement bénigne, mais peut être exacerbée ou se répéter au sein d’un élevage, ce qui entraîne des problèmes sanitaires et des pertes économiques importantes. Ces virus ont un potentiel zoonotique (ils peuvent se transmettre à l'Homme). Les activités de l'Agence sur ces virus se répartissent en plusieurs niveaux d'intervention et de compétence, qui servent l’expertise : la référence, l'épidémiosurveillance et la recherche.

Comme tous les virus grippaux (aussi appelés influenza), ceux responsables de la grippe chez le porc sont en constante évolution. Le porc peut être infecté par des virus influenza porcins mais également par des virus influenza humains ou aviaires. Il peut donc devenir un hôte intermédiaire pour la transmission de virus influenza aviaires à l'homme, mais aussi servir de « creuset », où, à la faveur des co-infections, de nouveaux virus dits réassortants peuvent émerger (les virus réassortants possèdent des gènes issus de virus influenza de différentes origines). Ainsi, un grand nombre de souches différentes a été isolé au fil des ans via la surveillance effectuée dans les élevages de porcs. Globalement, des virus de trois sous-types (H1N1, H3N2 et H1N2) circulent dans la population porcine, mais de nombreuses lignées génétiques (ou génotypes) se distinguent au sein de chacun de ces sous-types, selon l’origine de chacun des gènes viraux.

Surveiller la santé des porcs pour anticiper les pandémies chez l’homme

Les virus influenza porcins de type A (ou swIAV pour swine influenza A virus) sont à potentiel zoonotique, et peuvent donc se transmettre à l’Homme. En 2009, le virus H1N1pdm09, qui a provoqué une pandémie chez l’Homme, était issu d’un réassortiment de plusieurs swIAV. Son émergence a rappelé la nécessité de surveiller et d’étudier les virus grippaux chez le porc, tant d’un point de vue de la santé animale que de la santé humaine. Ce virus s’est ensuite répandu dans de nombreuses populations porcines du monde entier dès 2009. À la faveur de co-infections avec d’autres swIAV, le virus H1N1pdm09 a été à l’origine de l’émergence de nouveaux virus réassortants, dont certains ont également diffusé dans certaines populations porcines. Parmi eux, quelques-uns ont été responsables de cas d’infections humaines.

L’Anses, laboratoire de référence sur la grippe du porc

Le laboratoire de Ploufragan-Plouzané-Niort de l’Agence est laboratoire national de référence pour l’influenza porcin (LNR IP) depuis août 2009. Ce LNR est hébergé par l’Unité de Virologie Immunologie Porcines (VIP). À ce titre, l’Unité VIP développe, valide et contrôle des outils de diagnostic permettant de détecter et d’identifier les sous-types et lignées de virus influenza A chez le porc. Il anime le réseau de laboratoires vétérinaires agréés pour le diagnostic moléculaire de ces infections. Il vérifie notamment le maintien de leur aptitude en organisant des essais inter-laboratoire. Il fournit des réactifs de référence (qui permettent de détecter les virus ou les anticorps dirigés contre ces virus) et offre un appui technique pour caractériser plus finement les virus identifiés.

Une surveillance active des souches de virus présents en France

Bien qu’elle ait un impact économique et sanitaire important pour la filière porcine, et qu’elle puisse toucher l’Homme, la grippe porcine n’est pas une maladie réglementée et il existe peu de dispositifs de surveillance formalisés et pérennes. Les connaissances des virus en circulation sur un territoire varient selon les pays, et sont souvent éparses ou incomplètes. En France, les unités de Virologie Immunologie Porcines (VIP/LNR IP) et Epidémiologie Santé Bien-Etre (EPISABE), du laboratoire de Ploufragan-Plouzané-Niort contribuent très activement à la surveillance des virus influenza porcins depuis 2005. Celle-ci s’est amplifiée à partir de 2011, avec la mise en place du réseau national de surveillance « Résavip ». La surveillance menée par ce réseau permet de décrire la diversité génétique et la répartition géographique des virus influenza porcins.

En outre, l’Anses développe ou contribue à des programmes de surveillance spécifiques, dans certains élevages, voire certaines régions, en fonction de contextes épidémiologiques particuliers. Des enquêtes ponctuelles sont également menées sur les sangliers sauvages. Des travaux prospectifs concernent par ailleurs les virus influenza de types B, C et D, beaucoup moins pathogènes ou moins fréquents chez le porc que les virus influenza de type A.

Une activité qui se décline à l’international

L’Agence est représentée au sein du réseau international OFFLU, réseau conjoint OIE-FAO pour les virus influenza animaux, qui permet d’échanger sur les virus en circulation au-delà des frontières européennes. Plus particulièrement, l’Unité VIP est membre actif du « Swine Influenza Virus Technical Group » de ce réseau. Les résultats échangés permettent d’informer l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) des émergences de virus influenza porcins qui pourraient présenter des risques pandémiques. L’objectif est de sélectionner des souches pour le développement de nouveaux vaccins quand cela est nécessaire.

Des activités de recherche pour mieux connaître le virus, ses facteurs de transmission et ses effets sur le porc

L'Agence mène plusieurs travaux de recherche sur la grippe du porc :

Suivre l’évolution génétique et antigénique des virus influenza porcins

Les virus identifiés en France dans le cadre de l’épidémiosurveillance font l’objet d’études approfondies au niveau de leurs gènes et de leurs antigènes (les antigènes étant des molécules virales reconnues par le système immunitaire de l’animal infecté). Ces études visent à améliorer les connaissances sur l’évolution des swIAV en France, leur diversité et les contextes d’émergence de nouvelles lignées de virus. L’analyse approfondie des séquences génétiques des virus vise à identifier des déterminants moléculaires de la virulence ainsi que des caractères qui pourraient contribuer à faciliter la transmission des virus porcins à d’autres espèces animales, et notamment à l’Homme. Ces propriétés sont étudiées via des analyses bioinformatiques, en culture cellulaire, et quand c’est nécessaire sur des animaux.

Ces connaissances contribuent à étayer l’expertise, et permettent d’informer les autorités françaises de toute nouvelle émergence à risque, tant pour la santé animale que la santé humaine.

Étudier la dynamique des virus influenza porcins et leur pathogénicité  

L'infection grippale chez le porc entraîne généralement des manifestations cliniques peu prononcées et ne concerne qu'une partie des porcs d’un même élevage. Cependant, l'infection peut prendre une tournure plus sévère et quasi générale, en fonction de la virulence de la souche impliquée et des pratiques d’élevage. Des infections concomitantes par d’autres pathogènes affectant le système respiratoire peuvent entraîner des complications. D’autres conditions défavorables, encore mal définies, pourraient également influencer la sévérité de la maladie.

De plus, alors que l’infection influenza est d’ordinaire responsable d’un syndrome grippal ponctuel (épisodique), une forme récurrente de la maladie s’est accentuée dans les élevages au cours des dernières années. Ces épisodes grippaux répétés conduisent à une déstabilisation des élevages infectés et pourraient favoriser les coïnfections par plusieurs souches de virus influenza, et donc les réassortiments viraux. Des travaux de recherche sont conduits en élevage (études épidémiologiques observationnelles) et in silico (modélisation épidémiologique), afin de mieux comprendre les déterminants de la persistance des virus au sein des élevages de porcs

Étudier le rôle des virus influenza dans les syndromes respiratoires chez le porc

L’Agence étudie la dynamique des souches en élevage et les facteurs associés aux différentes sévérités et formes épidémiologiques de la maladie. Des travaux expérimentaux et de modélisation portent sur les caractéristiques de la transmission des virus influenza porcins d’un animal à un autre. Les modalités de la transmission par l’air sont également étudiées, en tenant compte des différentes conditions de ventilation dans les élevages. Les infections à swIAV sont parfois associées à des infections par d’autres pathogènes, bactéries ou virus. Cette double infection peut entrainer des complications pour la santé de l’animal. Des études expérimentales sont menées sur des porcs au statut sanitaire élevé (porcs exempts d’organismes pathogènes spécifiés, EOPS), afin d’étudier les mécanismes sous-jacents aux synergie ou au contraire aux interférences entre ces pathogènes du système respiratoire du porc. Ensemble, les résultats des enquêtes épidémiologiques, des travaux de recherche expérimentale et des travaux de modélisation permettent de mieux connaître la maladie et de proposer des mesures de prévention et de maîtrise aux vétérinaires et aux éleveurs.

Les travaux de recherche menés sur les virus influenza porcins à l’Agence sont partagés au sein du Groupement de recherche sur les virus influenza, créé par le CNRS le 1er janvier 2020 et dénommé RésaFLU. Celui-ci s’est donné pour mission de promouvoir un réseau interdisciplinaire, qui fédère les équipes françaises travaillant sur les virus influenza responsables de la grippe chez l’homme et chez l’animal. Ses axes scientifiques portent sur la compréhension des mécanismes d’émergence de nouveaux virus influenza, l’identification des facteurs déterminants de la physiopathologie des infections à virus influenza, ou le développement de nouvelles stratégies préventives et thérapeutiques.